Chienne, louve, faune et Flore

Le 29eme Prix de Flore est revenu à Joffrine Donnadieu pour son roman “Chienne et Louve”, chez Gallimard. Côté atmosphère, le prix littéraire le plus couru de Paris n’a pas démérité. Atmosphère, atmosphère.

Joffrine Donnadieu ne savait pas qu’il y avait un cadeau bonus dans le Paic Citron qu’elle achetait, cet après-midi du 10 novembre, au Monoprix de son quartier. C’est pile à ce moment, les mains encombrées et tandis que la journée se déroulait sous un ciel d’eau de vaisselle, que son téléphone sonna. Précisément ce que Pierre Dac nommait la loi de l’emmerdement maximum.

Au bout du non-fil, une voix annonçant à la romancière qu’elle venait d’être élue lauréate du Prix de Flore inventé il y a vingt-neuf ans et dont la principale caractéristique, au-delà- du chèque qui l’accompagne, soit un montant de 6150 euros (le Paic Citron, a commenté l’intéressée, va couler en abondance), consiste à offrir chaque jour de l’année un verre de jaja aux récipiendaires. Les verres non bus sont-ils rattrapables ? La question mérite d’être posée à Carole Chrétiennot, papesse de l’événement qui s’emploie à en faire, avec ses douze jurés parmi lesquels Frédéric Beigbeder en figure de proue, la fête la plus littéraire la plus courue de Paris.

Joffrine Donnadieu
Joffrine Donnadieu

Joffrine, qui est de Toul mais peut en remontrer à l’Ange au sourire de Reims, a fait une entrée plus que remarquée en littérature en 2019 avec le pas du tout correct « Une histoire de France ». Jeudi, elle l’a emporté au troisième tour de scrutin par huit voix contre quatre à Emma Becker (« L’Inconduite », Albin Michel), pour « Chienne et louve », chez Gallimard.  Becker versus Donnadieu, ce cru 2022 s’annonçait thématique.

« Chienne et louve » raconte l’histoire d’une apprentie comédienne, Romy, amenée, pour payer ses cours et sa chambre, à se transformer la nuit en strip-teaseuse dans les miroirs sans tain de Pigalle. Mais ce récit très imprégné de la propre expérience de l’auteure porte aussi en son sein, si je puis dire, la relation troublante entretenue entre cette diablesse de Donnadieu, petite Lorraine quoique non pucelle, et sa sainte logeuse, adoratrice de la Vierge Marie. Sexe et pureté : l’affaire prend un côté mystique et c’est ainsi, comme l’a dit et répété dans ses chroniques le si cher Vialatte, qu’Allah est grand.

Yarol Poupaud
Yarol Poupaud

Après les délibérations, ce furent délires et libations. Merci encore, Alain Spira. Je te pille. Tu sais qu’on m’appelle Pillard Vavasseur. Sur ce plan – les libations, pas le pillage – le Prix de Flore a toujours été une sacrée foire d’empoigne. Les fiestas de Cannes font très petit joueur à côté. Cette année, Carole et sa brigade testaient une nouvelle formule : dîner assis puis lâcher des fauves pogotant entre les tables (ou dessus) sous un déluge de rock. Yarol Poupaud et son groupe F.F.F. dont les F.F.Fans attendent avec impatience le nouvel album, se sont chargés de mettre en transe les banquettes et les fauvettes. Le champagne naviguait au-dessus des têtes comme des catamarans au plus fort de la Route du Rhum. Le champagne était lui-même arrosé d’un 2nd Pez 2019, rouge St-Estèphe, lequel a fait une petite place à l’organic vodka estampillée Beigbeder et baptisée Le Philtre, servie glacée dans la chaleur ambiante et ambiancée. Une écrivaine de renom, visiblement nue sous sa robe, la relevait en ondulant de toute sa silhouette, avec des regards de chienne et de louve. La logeuse de Romy n’aurait pas apprécié du tout.

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